Deux études ont été menées pour mieux connaître les causes et les fréquences des explantations et réimplantations cochléaires (ERI) d’après les données du registre national des implants cochléaires (EPIIC).
Nous remercions le Dr Isabelle Mosnier, responsable de l'unité fonctionnelle Implant Auditif de La Pitié Salpêtrière pour la relecture de ce résumé.
Étude sur la fréquence et les principales causes d’explantations et de réimplantations cochléaires
La première étude1 réalisée par plusieurs équipes médicales des centres d’implantations français vise à déterminer la fréquence et les principales causes d’ERI, après 5 ans de suivi(2012 à 2016), de 5051 patients, enfants (≤18 ans) et adultes, tous inscrits dans le registre d’EPIIC.
Les données utilisées concernaient : l’âge de la première Implantation Cochléaire (IC) et celui de l’Explantation Cochléaire (EC), l’origine de la perte auditive et sa date d’apparition, le pourcentage d’électrodes insérées à la première IC et après ERI.
→ 95 / 5051 patients (1.9%) ont subi une IC suivie d’une ERI dont 4 ont dû avoir une 2ème ERI soit 99 ERI au total
→ L’ERI est plus élevée chez les enfants (60) que chez les adultes (39)
→ 86% des cas ont subi une ERI dans le même temps opératoire
→ 14% des ERI l’ont été de cause inconnue
→ 46.4% des ERI avaient pour cause un dysfonctionnement de l’IC : IC lui-même, électrodes non fonctionnelles, diminution de la performance sans défaillance du matériel
→ 39.3% des ERI avaient pour cause un motif médical /chirurgical : mauvais positionnement des portes électrodes ou migration d’électrode, infection du matériel implanté, autre complication médicale
→ Dans la littérature médicale, d’autres études rapportent 69.2% de dysfonctionnement du matériel et 30.8% de raisons chirurgicales/médicales
Conclusions
L’ERI reste rare mais ne présente pas de difficulté chirurgicale majeure et dans la plupart des cas elle permet une meilleure insertion que lors de l’IC primaire.
Par contre, l’évolution fonctionnelle (perception de la parole, langage oral chez l’enfant) n’a pu être étudiée par manque de données audiométriques assez précises dans ce registre EPIIC.
Le faible taux d’explantation dans cette étude est probablement lié au fait que l’analyse a été faite sur une période de 5 ans, même si elle a inclus des patients implantés avant le début du registre et réimplanté pendant la période de suivi. Il n’y avait pas de renseignement concernant la marque et le modèle d’implant dans cette analyse.
Étude sur les proportions et les raisons de l’explantation cochléaire
La deuxième étude2 a été réalisée par un pharmacien responsable des dispositifs médicaux dans un centre d’Implantation Cochléaire (IC)parisien pour les adultes avec l’appui de 2 médecins et le centre d’IC Rothschild à Paris, elle vise principalement à déterminer les raisons de l’Explantation Cochléaire (EC) et la proportion pendant la période de garantie de 10 ans du fabricant.
En effet, l’assurance maladie prend en charge les frais liés à la chirurgie, hospitalisation, etc. … mais ne prend en charge la partie interne de l’implant que lorsque que celui-ci est en dehors de la période de garantie (10 ans) ou en cas de raison médicale.
Cette étude sur 33 mois (2013 à 2016) a porté sur 71 explantations signalées à la pharmacie hospitalière soit environ 4% des 2000 adultes implantés suivis dans le centre de référence.
→ 1% des EC sont inclassifiables
→ 54% des EC ont été réalisées pour des raisons médicales, dans un délai allant de moins d’1 an à 26 ans après l’IC : infections diverses, mauvais positionnement des portes électrodes ou migration d’électrode…
→ 45% des EC ont été réalisées pour une défaillance de l’Implant, dans un délai de 8± 6 ans après la première IC : défaut d’étanchéité, dysfonctionnement du faisceau d’électrodes, panne électronique
→ 69% des EC pour défaillance du matériel ont vu l’application de la garantie décennale du fabricant
→ 69 % des EC ont été suivies de Réimplantations dont 60% dans le même temps que L’EC
Conclusions :
Le pourcentage des EC pour défaillance du matériel est similaire à celui de l’étude d’Hermann et Al.1 Cette étude apporte une aide à la décision de réimplantation et permet une meilleure information du patient. Elle met l’accent sur la nécessité d’un suivi médical régulier (migration porte électrode, force de l’aimant) et des contrôles audiométriques et orthophoniques pour détecter une performance altérée, ou une défaillance de l’implant, tout en informant le patient d’un éventuel manque de bénéfice à une ERI.
→ Le pourcentage des EC pour défaillance du matériel est similaire dans les 2 études :45% pour le centre de référence et 46,5% pour celui effectué à partir du registre EPIIC.
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1 Registre National des Implants Cochléaires (EPIIC) : Explantation et réimplantation cochléaire
The French National Cochlear Implant Registry (EPIIC): Cochlear explantation and reimplantation
R. Hermann, A. Coudert, K. Aubry, P. Bordure, A. Bozorg-Grayeli, O. Deguine, C. Eyermann, V. Franco-Vidal, B. Godey, N. Guevara, A. Karkas, N. Klopp, M. Labrousse, J.-P. Lebreton, Y. Lerosey, E. Lescanne, N. Loundon, R. Marianowski, F. Merklen, K. Mezouaghi, T. Mom, S. Moreau, I. Mosnier, N. Noël-Petroff, C. Parietti-Winkler, P. Piller, C. Poncet, E. Radafy, S. Roman, S. Roux-Vaillard, S. Schmerber, L. Tavernier, C. Vincent, E. Truy
European Annals of Otorhinolaryngology, Head and Neck Diseases, Volume 137, Supplement 1, 2020, Pages S45-S49,https://doi.org/10.1016/j.anorl.2020.07.006.
2 Analyse et prise en charge de l'explantation d'implant cochléaire chez l'adulte
Analysis and management of cochlear implant explantation in adults
M. Bourdoncle, C. Fargeot, C. Poncet, I. Mosnier
European Annals of Otorhinolaryngology, Head and Neck Diseases,Volume 137, Issue 6,2020, Pages 459-465,https://doi.org/10.1016/j.anorl.2020.04.001.